Ils y avaient décrypté une société française aveugle à ses diversités, emprunte de déterminismes sociaux, échouant à sa promesse républicaine. Un rapport ambitieux, qui non seulement, dressait l’état de l’inégalité des chances visant les minorités et les quartiers relégués, mais plaidait aussi pour l’édification d’une « France pluraliste ».
« Peu à peu, on a vu les entreprises se désintéresser du sujet et vers 2008, il est complètement sorti de la focale des décideurs ». Irriguant le milieu entrepreneurial, la préoccupation pour cette diversité se fige pourtant au lendemain des révoltes urbaines, capté par une rhétorique politicienne. « Quand j’arrive au cabinet d’Azouz Begag, je me dis, formidable ! on va pouvoir mettre en œuvre le fruit de deux ans de réflexion à l’Institut Montaigne, on va pouvoir passer à l’acte ! » se souvient cette chantre de l’affirmative action sur la question de l’emploi. C’est-à-dire, passer à une autre étape en termes de reconnaissance des minorités en France, une étape permettant de mesurer et de nommer les phénomènes de discriminations. A l’image du débat sur la parité, qui a pu avancer dans un cadre législatif, à travers, notamment la loi Copé-Zimmermann adoptée en 2011 instaurant un quota de 20 % de femmes dans les conseils d’administrations.
« La charte, à son lancement,
a suscité beaucoup d’espoirs dans les quartiers. »
Sur les questions d’origine, l’Etat n’a jamais su se positionner, démuni de données chiffrées dépeignant la réalité.
Sur le modèle de la parité
Pour changer le monde : secteur public ou secteur privé ?
Travail de fond à l’Institut Montaigne, émulation autour de la Charte avec les dirigeants d’entreprises, Laurence a rencontré aux débuts des années 2000 un monde économique proche des réalités de terrain et prenant peu à peu conscience de l’ampleur des discriminations. Un monde en butte, plus tard, à la temporalité si longue des processus de décision en politique. Le cabinet ministériel disparaît fin 2007, en plein débat sur l’identité nationale. Cette expérience opère ainsi, chez elle, une prise de conscience et dessine une conviction. Fille de Pierre Méhaignerie, actuel mairie de Vitré, ancien ministre sous les gouvernements Chirac (1986) et Balladur (1993-1995), Laurence grandit en Bretagne « avec l’idée que c’était à partir du secteur public que l’on pouvait transformer le monde ». Pour, progressivement, arriver à cette conviction que l’entreprise était le principal levier de changement sociétal dans le monde à venir.