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Fils d’un père italien et d’une mère égyptienne, Marc Cheb Sun grandit à Saint-Ouen, dans cette « zone », à la porte de Paris, et à laquelle s’accroche, pourtant, ce sentiment d’en être si loin. « Nos parents nous apprenaient que les bergers allemands des policiers étaient dressés pour reconnaître l’odeur des Arabes. J’ai grandi avec cette peur bleue des chiens ». Peur symbole d’une relégation perçue comme fataliste, dont il se souvient quarante ans plus tard. Orientation scolaire assignée, chômage systémique, violences policières, autant d’éléments d’un ordre vécu comme inébranlable. Saint-Ouen, c’était ce quartier multiculturel aussi, où chacun s’identifiait et se reconnaissait implicitement au rythme des fêtes religieuses, l’enfant sachant qu’à telle célébration, il aura droit à tel gâteau au goût d’une culture. C’était au début des années 1980. Autodidacte, Marc tisse ensuite sa fibre militante en Allemagne. À Berlin, des drapeaux nazis flottaient parfois aux fenêtres. Témoin de violences néonazies contre les travailleurs migrants, victime lui-même d’une agression, il s’engage dans une lutte organisée par les migrants eux-mêmes. De ce collectif naît une première revue : « The People ».


Des énergies

« Je ne veux pas que cette violence, extrême, soit l’unique agenda auquel se référer. C’est très important de développer des espaces où pouvoir développer des réflexions de créativité qui ne sont pas seulement des réactions. » Se définissant longtemps comme un « marginal », l’homme a davantage les traits de ce « mutant » à qui il adresse un manifeste dans ses ouvrages d’Ailleurs et d’ici, revue annuelle dont le deuxième tome est publié ce mois de novembre, célébrations des identités plurielles. Le mutant ? Il est de ceux « qui s’inscrivent dans un mouvement de l’identité et souhaitent valoriser, sans hiérarchie, tout ce qui les compose ». Le mutant est à l’image de cette jeune fille, Gamra, qui réalise avoir en elle « cette capacité à partir ». Elle l’exprime, parmi 11 jeunes « de quartiers » dirait-on, dans un premier chapitre, façonné en atelier avec l’association Passeport Avenir.

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De retour en France, Marc prend ses distances avec l’action militante pour se concentrer sur un travail d’écriture, vocation naissante : « Pourtant, ce n’était pas une porte que je laissai ouverte dans mon esprit. J’avais quitté l’école avant le bac. Mais entre cette expérience militante, ce désir de réflexion et d’écriture, une cohérence est apparue ».

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